25 mars 2012

Une ferme sur les toits d'un grand ensemble ?

Saluons le lancement début 2012 du Laboratoire d'Urbanisme Agricole, association créée à l'initiative de l'agence d'architecture SOA, du bureau d'ingénierie environnementale Le Sommer Environnement et du bureau d'études de Gally, spécialisé en paysage et en innovation végétale et agricole.

L'association s'inscrit dans la lignée des travaux de Dickson Despommier, professeur de santé publique à l'Université de Columbia, qui travaille depuis 1999 au concept de "ferme verticale". Parmi les différentes tendances de ce que l'on nomme agriculture urbaine, nous sommes donc ici clairement face au modèle "intensif - métropolitain", et non face au modèle "extensif - périurbain" dont on parle plus généralement (cf. les réflexions en cours sur le Plateau de Saclay par exemple). Nous aurons l'occasion d'en reparler.

SOA est l'auteur du très remarqué projet (utopique) de "tour vivante" en 2005, tour mixte de bureaux et de logements intégrant une production maraîchère intensive et un point de vente, et plus récemment du (non moins utopique et un brin provocateur) projet "Urbanana", une ferme intensive de bananes sur les Champs-Elysées, associée à des laboratoires de recherche, un restaurant, une boutique ainsi qu'un espace d'exposition !
La tour vivante (c) SOA
Urbanana (c) SOA
Le Laboratoire d'Urbanisme Agricole entend capitaliser sur ces premières réflexions pour étudier des projets plus "réalistes". La réhabilitation / résidentialisation de la cité Marcel Cachin à Romainville a fourni l'occasion d'une première commande. L'association a en effet été chargée d'étudier la faisabilité de l'implantation d'une exploitation agricole sur les toits d'un grand ensemble des années 50.
Une ferme urbaine sur les toits de la cité Marcel Cachin à Romainville
(c) Laboratoire d'Urbanisme Agricole

Dans ce projet, trois serres sont prévues, chauffées à des températures différentes pour permettre de cultiver différents légumes toute l'année. Les cultures se font dans des bacs, superposés sur deux niveaux. L'étude traite assez précisément des problèmes fonctionnels qui ne manquent pas de se poser : stockage et amenée du matériel agricole et de la terre, entretien du matériel, gestion de l'eau et des déchets, stockage, conditionnement et transformation des biens produits... Les locaux techniques et locaux de travail correspondant sont soigneusement définis.

Les habitants ne sont pas oubliés : dans la mesure où la création de la ferme nécessite la mise en place d'une nouvelle structure en portique doublant par l'extérieur la structure existante, on en profite pour étendre les logements par des balcons et jardins d'hiver rapportés, en peu à l'instar de la réhabilitation de la tour Bois-le-Prêtre dans le 17e arrondissement (Paris Habitat, arch. Druot et Lacaton-Vassal).
Coupe de principe : ferme sur les toits et extension des logements
(c) Laboratoire d'Urbanisme Agricole

Restent quelques zones d'ombre, comme la nature des agriculteurs ou le mode de commercialisation (marché, paniers, AMAP....). Au delà des investissements, nécessairement importants mais qui pourraient être partiellement pris en charge par l'opération de réhabilitation compte tenu des mutualisations prévues, le modèle économique d'une telle exploitation agricole reste en grande partie à construire. Espérons donc que ces questions trouveront rapidement des réponses et que ce qui apparaît encore aujourd'hui comme une utopie pourra voir le jour dans les prochaines années.

Voir le site web du Laboratoire d'Urbanisme Agricole pour plus de détails